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Tribune dans le Figaro / Nantes: «Le départ des religieuses, symptôme d’une ville profondément malade»

Par sécurité nantes, TribuneAucun commentaire

FIGAROVOX/TRIBUNE – Deux sœurs d’une communauté religieuse ont annoncé quitter Nantes, en raison de l’insécurité. Guillaume Richard, conseiller municipal d’opposition à Nantes pointe du doigt la violence croissante dans cette ville, sur fond de mauvaise gestion de la municipalité.

Guillaume Richard est conseiller municipal d’opposition (Horizons) à Nantes et conseiller métropolitain.


Il y a quelques jours, deux membres d’une communauté religieuse bénédictine, Sœur Agathe et Sœur Marie-Anne, annoncent quitter Nantes. La vie dans leur communauté et au sein de l’église Sainte-Croix, au cœur de la ville, devient insupportable. Trop de folie et trop de violences. Des religieuses qui quittent Nantes pour des raisons d’insécurité : le sujet est délicat. Les responsables politiques préfèrent ne rien dire. La maire de Nantes envoie un adjoint peu connu. Une phrase discrète et maladroite fera office de communiqué de presse pour la mairie, qui pensait avoir calmé les esprits au mois d’octobre dernier. La droite, elle, s’empare du sujet, dénonce, et s’inquiète. Chacun sent que ce nouveau «dossier» peut faire oublier le merveilleux dynamisme de notre ville.

Les faits sont simples et dramatiques : des aidants, désintéressés, qui interviennent au quotidien pour les plus malheureux, ne peuvent plus exercer leur mission. Celle de venir en aide aux plus démunis. À la lecture du témoignage de Sœur Agathe et Sœur Marie-Anne, le premier sentiment n’est pas politique. C’est de l’émotion. Que devons-nous penser d’une ville qui ne parvient pas à retenir les meilleurs d’entre nous ? Ceux qui ont donné leur vie aux autres, ceux qui accompagnent au quotidien les gens dans le besoin. Sœur Agathe et Sœur Marie-Anne, dans leur grande bonté, n’ont pas détaillé les profils de ceux qui sont la raison de leur départ. Mais elles retiennent de ces mauvaises rencontres, des «personnes ayant besoin d’un accompagnement psychiatrique». Une formule de politesse pour décrire la folie qui s’empare d’un homme ou d’une femme sous l’emprise de la drogue.

 

Quand un fait exceptionnel devient ordinaire, c’est le signal symptôme d’une ville qui doit réagir vite.

 

Sans retracer l’histoire de ces dernières années, on sait à quel point la drogue détruit nos quartiers. À Nantes comme dans toutes les grandes villes de France. Les quartiers populaires organisent le trafic quand la place du Commerce distribue. Triste ironie pour une activité qui pourrit le quotidien des habitants. Et aux dernières heures du jour, les vieilles rues bretonnes du quartier Bouffay ne rappellent plus grand-chose de notre histoire. Elles laissent la place à une vie perturbée par les nombreux drogués qui errent au mépris des professionnels de la restauration et du tourisme. Et au milieu de tout cela, des religieuses au service des autres avouent ne pas avoir le courage des Franciscains du Bronx. Parce qu’elles sont des religieuses catholiques, mais aussi parce qu’elles sont des femmes.

Ainsi dans la ville qui se veut la moins sexiste de France, ne parviendrions-nous pas à les protéger? La rue de Solférino, une fois de plus, est bien loin du pragmatisme dont nous avons besoin pour protéger les femmes, premières victimes de l’insécurité à Nantes. Autre remarque plus alarmante : les sœurs restent persuadées que plus de policiers ne feront rien. Et pourtant la droite demande plus de policiers armés et plus de caméras de surveillance. Consciente de l’immense retard que nous avons. La police, malgré son travail remarquable, intervient a posteriori pour la gestion d’épisodes isolés.

Et souvent, la violence est trop grande malgré des chiffres qui s’améliorent grâce à l’opposition municipale qui a réveillé la maire fin 2022 en mobilisant les Nantais et les médias nationaux. Mais quand un fait exceptionnel devient ordinaire, c’est le signal symptôme d’une ville qui doit réagir vite. Il y a maintenant un choix à faire. Voulons-nous tordre le cou à l’insécurité ? Si oui, il faut nous engager sur le court terme, comme sur le long terme. Le court terme : La politique de la «vitre brisée». Elle semble être l’option la plus sérieuse, car il ne faut plus rien laisser passer.

 

À Nantes, c’est précisément cette politique hasardeuse qui est responsable de l’insécurité que nous vivons.

 

Cette théorie, développée par deux célèbres criminologues américains, se résume en une phrase : «Si la vitre d’un immeuble n’est pas réparée, toutes les autres seront bientôt brisées». La politique de la vitre cassée, c’est une politique de tolérance zéro. Car une vitre non réparée, c’est le signal que personne ne regarde, et que personne n’en a rien à faire. Le long terme : définir une vision de Nantes à 20 ans. La vision commune d’une ville et d’un quartier est le terreau indispensable pour créer le lien social entre les habitants. C’est une vision de long terme qui permet de réussir le développement d’un territoire. En anticipant l’urbanisme, l’écologie et les stratégies de déplacement, on jugule l’insécurité.

Car l’insécurité est le corollaire direct d’une mauvaise politique de la ville. À Nantes, c’est précisément cette politique hasardeuse qui est responsable de l’insécurité que nous vivons. Densité de ville mal calibrée, mauvaise stratégie de mixité sociale, abandon des quartiers, échecs successifs des projets culturels : la ville ne tient que par les qualités des Nantais et des Nantaises qui heureusement continuent à développer leur ville. Alors on demande une nouvelle fois, encore et encore, un changement de cap. Mais la maire de la ville préfère s’afficher avec les sans-cravates du Palais Bourbon, preuve que son rapport avec l’autorité est pour le moins compliqué.

Et pourtant, elle demande des moyens complémentaires, des policiers, des juges et elle dira lors de notre prochain conseil municipal qu’elle condamne avec la plus grande fermeté toute forme d’intolérance quelle qu’elle soit – Acte 1. Et elle retournera à son seul combat, faire de Nantes l’expérimentation idéologique de la rue de Solférino – Acte 2 .

Heureusement beaucoup de Nantais et de Nantaises défendent et promeuvent leur ville avec succès. Le dynamisme économique de notre territoire en est la première preuve. Espérons donc un sursaut d’efficacité de la majorité, au service de nos concitoyens qui commencent à s’impatienter.